Des riverains et des membres d’un membership de soccer se plaignaient du voisinage d’un camp de migrants de l’Est installé illégalement dans le quartier Malakoff. La procédure d’expulsion, d’abord repoussée par la préfecture et d’énoncée par des politiques, a été activée vendredi.
Le Figaro Nantes
Les quelques caravanes, défraîchies, ont été évacuées vendredi matin. Même choisi pour la dizaine de familles qui les habitaient et réussissaient dans des circumstances pour le moins spartiates. Sous le coup d’une expulsion prévue le 2 novembre dernier, le bidonville de migrants de l’Est, installé illégalement dans le quartier prioritaire de Malakoff à Nantes, sur un terrain appartenant à la Ville, vient d’être vidé quinze jours plus tard . La préfecture de Loire-Atlantique qui avait mis le file sur pause a donc décidé de passer à l’motion malgré les contestations politiques en cours dénonçant l’absence de resolution de relogement à vacation spot des familles Roms.
Au début du mois, dans un communiqué, deux députés LFI – Ségolène Amiot et Andy Kerbrat – élus dans l’agglomération nantaise avaient déclaré une expulsion «Indigne d’une mairie socialiste» qui ne «Répondez pas à notre devoir d’humanité et de fraternité envers ces personnes précarisées». Le groupe écologiste et citoyen avait lui dénoncé une «scenario inacceptable et inenvisageable» ce qui avait engendré un « désaccord acte » avec le reste de la majorité municipale déterminé par la maire PS Johanna Rolland. Des divergences politiques analysées avec amertume par certains riverains du bidonville comme a pu le constater Le Figaro sur place, mercredi, deux jours avant l’expulsion qui était alors encore en suspens. «Les élus viennent quelques minutes, font une publication sur les réseaux sociaux, puis se répartissent. Nous, on subit au quotidien»souffle Mariama.
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« Mécanique sauvage » et « prostitution »
La quadragénaire dénonçait des incivilités, un environnement dégradé et décrivait un voisinage compliqué. Khadija, une autre habitante du secteur, abondait : « Je n’en peux plus. Les déchets s’accumulent et les rats aussi.» Du côté du Sporting membership de Nantes, un membership de soccer dont les installations jouxtent le bidonville, le constat était là aussi sévère. Un bénévole décrivait « la présence d’excréments sur le terrain »des « problèmes d’hygiène »des «dégradations» et «des feux de pneus» qui brûlaient parfois lors de certains entraînements des 475 pratiquants licenciés. «Une jeune fille est venue récemment pour s’inscrire. En voyant le camp et cet environnement, elle a fait demi-tour», rapportait un coach. Dans le même sens, une maman confiait avoir inscrit son fils au membership mais pas sa fille pour les mêmes raisons. Un frein pour ce membership de quartier qui a pour vocation « L’émancipation de la femme par le sport » et dont la seule équipe adulte est féminine.
Contacté par jeudi téléphone en fin de journée, Jérémy Hadjres, le président du membership, ne mâchait pas ses mots à la veille de l’expulsion dont il n’avait pas connaissance. Exaspéré par deux ans et demi de cohabitation « difficile »il taclait la «mécanique sauvage», «les chiens qui attaquent les adhérents» ainsi que des «problèmes de prostitution». Lui aussi se plaignait des fumées toxiques : «La semaine dernière, ils ont fait brûler du cuivre lors d’un entraînement ce qui a irrité les poumons des enfants.» De quoi freiner la bonne marche du membership. «Nous avons une perte d’adhérents et le développement de la part féminine est ralenti», se désespérait-il. L’picture de la construction en était aussi écornée : «Quand on reçoit les golf equipment adverses, ils se demandent où ils mettent les pieds»regrettait-il, précisant que le parking était «défoncé». Comme a pu le constater Le Figarocelui-ci est parsemé de nombreux trous remplis d’une eau croupie en raison des pluies incessantes de cet automne. «Pour protéger l’accès à nos locaux, des énormes blocs de béton ont été déposés à l’entrée d’un chemin ce qui nous empêche de stationner à proximité ou nous faire livrer»déplorait encore le président du membership.
Le terrain de soccer synthétique du Sporting membership de Nantes jouxtait le bidonville qui a été évacué vendredi matin. JC / Le Figaro
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Une requête jugée «raciste»
Le 10 novembre, le membership avait lancé une pétition en ligne pour dénoncer la cohabitation afin de «protéger le membership». Fermée depuis, elle avait cumulé plus d’une centaine de signatures en quelques jours. Une initiative qui avait été signalée par certains internautes sur les réseaux sociaux accusant le membership de «racisme». Un vocabulaire repris par les deux députés LFI, qui dans un communiqué publié jeudi soir, dénonçait «l’instrumentalisation des adolescents» du membership pour «faire pression sur la mairie».
Cette posture a suscité l’ire de Jérémy Hadjres. «C’est de la fumisterie politique et une récupération qui me déçoit. Nous sommes un membership de quartier avec une diversité importante. Nous ne voulons pas de mal aux Roms juste dire que la cohabitation dans ces circumstances est unattainable»précisait celui qui met en avant sa double nationalité franco-algérienne pour tordre le cou aux accusations portées.
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Dépôts de plainte
Contactée quelques jours avant l’expulsion de ce vendredi, la mairie de Nantes confirmait des «problèmes d’insécurité et de tranquillité» en lien avec la présence du bidonville. Les mêmes difficultés que celles relevées par le membership de soccer – présence d’excréments, déchets – étaient évoquées. «Il y a aussi eu des agressions verbales et des problèmes de morsures de chiens»confirmait au FigaroPauline Langlois, une élue du quartier qui évoquait au moins deux dépôts de plainte.
«Nous partageons les ambitions de trouver des options pour les familles et nous restons mobilisés pour assurer la scolarisation des enfants»assure-elle en précisant que la municipalité « agissant en responsabilité » sur ce file. Pour l’heure, après l’expulsion de ce vendredi matin, la préfecture n’a pu être contactée pour connaître le devenir des familles expulsées. Sur les réseaux sociaux, plusieurs habitants ont déjà énoncé la scenario en cours.
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