Peu à peu le boulevard Saint-Germain (VIe arrondissement) s’anime. La circulation se densifie. Il est aux alentours de 18 heures et, comme d’habitude, les voitures cohabitent difficilement avec les bus, vélos, trottinettes, scooters, motos… Mais ce mercredi soir, c’est encore plus compliqué. Les policiers ont condamné une voie de circulation, celle proche du Mabillon, un célèbre établissement germanopratin. Le dispositif se met lentement en place pour accueillir la reconstitution du meurtre de Federico Martín-Aramburu, un ancien rugbyman argentin de 42 ans tué ici même le 19 mars 2022.
Les curieux se renseignent auprès de la poignée des journalistes présents. Et les habitants du quartier se souviennent : « Ah oui, le meurtre du Mabillon ». Seuls ceux qui peuvent prouver leur adresse ont l’autorisation d’entrer dans le périmètre tenu par les forces de l’ordre.
Magistrats, avocats, enquêteurs de la police judiciaire sont présents pour revivre cette matinée tragique. Avec un enjeu : confronter les déclarations sur le terrain, les comparer à la balistique, quelle place pour qui et surtout, ceci pour mettre en exergue les incohérences et les incompatibilités des déclarations. Pour ce faire, la Jeep dans laquelle circulaient les suspects a été sortie du storage. Vers 20 heures, une bâche estampillée « préfecture de police » est déployée pour que cette reconstitution se déroule à l’abri des salutations. Quelques proches des suspects ont fait le déplacement mais resteront à l’écart.
Assassinat ou meurtre ?
Loïk Le Priol, 28 ans et Romain Bouvier, 32 ans, deux figures de l’ultradroite, sont mis en examen dans cette affaire ouverte pour assassinat. Mais seul Le Priol est présent. Il apparaît coiffé d’un casque lourd, visage barré d’un masque chirurgical, gilet pare-balles sur les épaules.
Interrogé par nos confrères de France Bleu Pays basque, Me Christophe Cariou-Martin, avocat de Shaun Hegarty, ami de Federico Martin-Aramburu présent au second des faits et constitué partie civile, explique que le however de cette reconstitution est « d’écarter, au remaining, toute autre thèse que celle d’un murder volontaire commis avec préméditation ». Durant l’instruction, Loïk Le Priol a effectivement contesté cette préméditation.
Le 19 mars, vers 6h45, Federico Martín-Aramburu est atteint par cinq balles devant son hôtel à 100 m environ du Mabillon où il a eu une altercation quelques minutes plus tôt. Il s’écroule devant le n° 146 du boulevard Saint-Germain. Quelques jours après leur fuite, les deux suspects sont interpellés. Le Priol est rattrapé en Hongrie pays de transit puisqu’il avait prévu de se rendre en Ukraine. Bouvier est lui interpellé dans la Sarthe. Un homme qui l’aurait aidé à fuir est mis en examen pour « recel de malfaiteur ». La quatrième personne en trigger dans ce file est Lyson Rochemir, la compagnie de Le Priol, mise en examen pour complicité d’assassinat. Elle est soupçonnée d’avoir conduit la Jeep qui a transporté les deux principaux suspects la nuit du meurtre.
Aucun des avocats sollicités n’a souhaité s’exprimer avant cette reconstitution qui devait se poursuivre jusque tard dans la nuit de mercredi à jeudi.